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Le renversement de la charge de la preuve déposé au Sénat
Une proposition de loi portant réforme de la preuve de l'originalité des œuvres veut améliorer la protection des droits des auteurs.
Bonne nouvelle pour les organisations professionnelles représentant les auteurs : Une proposition de loi portant réforme de la preuve de l'originalité de l’œuvre est officiellement déposée au Sénat par Madame Sylvie Robert, Sénatrice d’Ille-et-Vilaine. Cette proposition dont le texte est disponible en ligne a pour objectif de rendre aux auteurs la possibilité matérielle de défendre leurs droits moraux et patrimoniaux devant les tribunaux. L'UPP salue la prise en compte par les parlementaires de cet enjeu d'importance pour tous les créateurs.
En France, patrie des droits d’auteur, le code de la propriété intellectuelle protège largement les créateurs d’œuvres de l’esprit. Pour le citer : « L'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous […] quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination » (articles L111-1 et L112-1 CPI). Ces dispositions fondent le droit d’auteur, c’est-à-dire le droit des auteurs à vivre de l’utilisation de leur travail d’une part, et à voir reconnaître publiquement et respecter leurs créations (droit à être crédité à chaque diffusion de leur œuvre, droit de refuser une diffusion, droit d’exiger que le format, la qualité, la couleur, l’intégrité de leur création soient préservés).
Le droit positif exige aujourd’hui des œuvres de l’esprit qu’elles soient « originales » c’est-à-dire « empreintes de la personnalité de leur créateur » pour qu’elles puissent être protégées par le droit d’auteur. Cela constitue une première limitation à la protection des auteurs. Il revient au juge de déterminer si les œuvres sur lesquelles portent un contentieux pour vol d’image, appelé « contrefaçon » (utilisation non rémunérée d’une œuvre, défaut de crédit, recadrage abusif…) sont ou non originales. Et dans le cadre de ce contentieux il appartient à l’auteur de prouver que son œuvre est originale, et non à l’utilisateur contrefaisant de prouver qu’elle ne l’est pas.
C’est là que réside actuellement la principale limite au droit d’auteur : dans un procès qui oppose un photographe à l’un de ses clients (en général une entreprise commerciale pour ses divers supports de communication ou de marketing), pourquoi celui dont le travail est utilisé sans son accord et sans rémunération doit-il supporter la charge de prouver que son travail est protégé ? Cela représente des coûts non négligeables (avocat, huissier... ) pour les photographes, qui trop souvent renoncent de ce fait à engager une procédure pour défendre leurs droits. Et les diffuseurs qui disposent en interne de moyens juridiques et financiers plus importants tirent une impunité pernicieuse de ce risque réduit de contentieux pour contrefaçon.
Le Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique (CSPLA), instance consultative auprès du ministre de la Culture, a dénoncé dans son rapport de 2020 cette « atteinte au procès équitable » pourtant consacré par la Convention Européenne des Droits de l’Homme, et a proposé une nouvelle rédaction de l’article L112-1 du CPI : « Il appartient à celui qui conteste l’originalité d’une œuvre d’établir que son existence est affectée d’un doute sérieux et, en présence d’une contestation ainsi motivée, à celui qui revendique des droits sur l’œuvre d’identifier ce qui la caractérise ».
Il était urgent que le législateur s’empare du sujet et l’Union des Photographes Professionnels, avec les organisations représentant les auteurs, a sollicité les Parlementaires sur ce point. Cette proposition de loi, qui propose de renverser la charge de la preuve en la faisant peser sur le contrefacteur, reprend les termes suggérés par le CSPLA. Elle représente déjà une avancée dans la protection des auteurs.
Matthieu Baudeau, Président de l'UPP commente : « Cette initiative parlementaire est le fruit des concertations menées entre les parlementaires et les organisations d’auteur, dont l’UPP. Son dépôt au Sénat, est donc une excellente nouvelle pour tous les créateurs. Son adoption par les assemblées serait un signal fort pour les auteurs dans un contexte où la création doit être soutenue sans faillir. »
1 Commentaire
J'ai travaillé pendant 23 ans pour une entreprise (PROVENCIA) comme reporter caméraman de manière associative jusqu'en 2010 puis professionnellement depuis 2011. Je faisais des photos au cours des événements de reportages vidéo de ma propre initiative. J'ai créé une photothèque avec PHRASEANET m'occupant de la gestion des documents photo, surtout pour assurer une totale confidentialité extérieure au groupe. En 2015, la photothèque abritait 23000 photos, et j'avais un budget de gestion de 1680 Euros mensuels. Un simple Responsable RH m'a imposé de réduire à 400 Euros mensuels, et comme je refusais cette proposition, il m'a tout simplement viré des prestataires, avec perte sèche de 12000 Euros annuels plus1680 Euros mensuels. Et le tribunal des référés d'Annecy, m'a obligé de fournir le disque dur, contenant ces 23000 photos, avec une amende de 3000 Euros, si je ne m'exécutais pas.
D'un côté PROVENCIA, plusieurs millions d'Euros de fortune, et de l'autre ma microscopique structure qui s'est retrouvée ruinée. J'ai tout essayé...en vain.
Je ne sais pas comment sortir de cette situation.
Je continue sur ma propre retraite, mais je suis dans le rouge vif depuis plusieurs années.
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